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Affichage des articles du novembre, 2020

Les doutes

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 J’ai une forme de passion du métier.  Un feu facile à rallumer chaque matin. D’habitude. Oui, parce que là il n’y a plus que des braises.  En ce moment, voyez-vous, je tangue. Ce qui nourrit « le feu », c’est en partie le sentiment de faire quelque chose d’utile. Devant tant de « derniers regards » croisés en peu de temps, je tangue.  Plus très sûre d’être efficace, de dispenser des traitements adéquats... Je ne souhaite pas être ailleurs.  Ma place est bien là, à poser l’indication d’une assistance respiratoire ou à en assurer la surveillance.  Il est juste lourd, ce doute, au moment d’endormir chaque patient qui peine trop à respirer.  Se reveillera-t-il? Serai-je la dernière personne qu’il aura regardée?  Alors j’y mets ce que je peux.  Les mots les plus doux, malgré le bruit des alarmes. Je n’esquive pas.  Je plante mes yeux dans les leurs. Je les regarde moi aussi. Pour qu’ils sentent qu’ils comptent. Pour qu’ils soient moins seuls. Jusqu’à ce que les yeux se ferment. Puis l’aspe

Nouvelle ère

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  Un changement subtil a opéré.  Un peu d’air.  Un nouveau lâcher prise. C’était samedi matin. Je suis allée travailler. Longtemps. Partie à 6h30, rentrée 14h plus tard. Pareil dimanche.  Et j’ai passé un bon week-end. J’ai fait ce que j’aime faire.  Je me suis occupée des patients.  Il a fallu changer la sonde d’intubation d’un malade et également lui mettre un drain thoracique. J’ai encadré un étudiant pour qu’il apprenne à poser un cathéter artériel, un interne pour la pose de voies veineuses centrales. J’ai appelé des familles de patients pour leur donner des nouvelles, réfléchi à deux ou trois situations cliniques que je ne comprenais pas bien.  J’ai discuté avec une collègue précieuse qui part à la retraite dans trois jours. Elle s’appelle Sylvette.  J’ai rencontré un nouveau médecin chef qui m’a franchement aidée. Une famille nous a offert du chocolat. Si tous les patients de mon « box » n’étaient pas là pour cause de COVID, on aurait pu croire que c’était deux jours de travail